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Berceuses et comptines de Bretagne

Les chants du coeur venus du fonds des temps tissent un lien profond entre adultes et enfants.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les comptines

Les comptines se transmettent sur les cours d'école d'enfant à enfant, leur mélodie simple, leur rythme répétitif leur ont permis de se perpétuer au fil des générations à tel point que leur origine s'est perdue.

Le plaisir est dans la répétition à l'infini, à deux ou en groupe d'une formule que tout le monde connaît.

"La comptine c'est encore une poésie sans problème où tout est permis. On peut y dire n'importe quoi. Bien des poètes d'aujourd'hui ne s'en privent pas. Ils écrivent des comptines car alors ils n'entendent plus les gens sérieux leur demander « qu'est ce que ça veut dire? »

Mais comme toutes les formules magiques, ça en dit long. En tout cas c'est très puissant."

Jacques Charpentreau

 

 

Explorer Son Corps

 

Je fais le tour de ma maison

Je ferme les volets

Je ferme les fenêtres

Je descends l'escalier

Je ferme la porte

Je tourne la clef

 

Face à face, l'enfant et l'adulte se regardent dans les yeux, les gestes sont dans un premier temps faits sur le visage de l'enfant puis sur le visage de l'adulte.

La ritualisation de ce jeu de toucher permet un contact physique entre l'adulte et l'enfant tout en fixant les limites.

 

A la fois caresse et jeu cette comptine s'apparente aux jeux de nourrice. Le bébé découvre des sensations peau contre peau et apprend à localiser les organes des 5 sens.

 

L'enfant prend conscience de son individualité, il apprend à distinguer son corps de celui de sa mère et participe ainsi à la construction de son image corporelle.

 

 

Exister-Se Séparer

 

Ainsi font font font

les petites marionnettes,

ainsi font font font

trois petits tours

et puis s'en vont

 

En prenant conscience de son corps, il découvre ses mains, c'est la première partie de son corps qu'il voit. Puis il réalise qu'il peut les bouger seul et jouer avec elles.

Son corps est maintenant distinct de celui de sa mère. Il comprend que celle-ci n'est pas toujours près de lui. Il va falloir apprendre à gérer ses départs et ses absences.

 

Sa mémoire se développant l'enfant peut se faire une image mentale de l'absente. Il comprend petit à petit que quand elle disparaît de sa vue elle continue d'exister sans lui.

La notion de séparation prend alors toute sa dimension.

 

Le jeu de caché-trouvé de cette comptine conceptualise la séparation. Il aide, par la répétition et la ritualisation à mieux vivre ces moments, le dénouement étant toujours heureux dans les retrouvailles.

 

 

Jouer avec les mots

 

Une Poule sur un mur

qui picotait du pain dur,

picoti picota,

lève la queue et saute en bas.

 

L'enfant découvre le langage. Il entend d'abord la musique de la langue avant d'en comprendre le sens. Chaque jour lui apporte des mots nouveaux. Certains revêtent un sens mystérieux dont lui seul a le secret.

 

Les comptines sont le fruit de la transmission orale. Certains mots ont pu varier au fil du temps jusqu'à faire perdre son sens à l'histoire. Mais peu importe car c'est la musique des mots qui compte :

Amstramgram, Picépicécolégram, Bourébourératatam, Amstramgram

 

"Je me souviens du plaisir à baragouiner des mots sans signification pour la seule jubilation de mâcher les sons, les bruits. Comme le potier pétrit l'argile avant de la tourner, je pétrissais dans mon palais la matière sonore."

Jean-Hugues Malineau

 

 

Nommer le corps

 

Savez-vous planter les choux,

à la mode, à la mode,

savez-vous planter les choux,

à la mode de chez nous ?

On les plante avec le pied,

à la mode, à la mode,

On les plante avec le pied,

à la mode de chez nous...

 

Cette comptine peut être développée à l'infini jusqu'aux plus infimes parties du corps, et s'accompagner de jeux psychomoteurs.

 

L'enfant achève la construction de son shéma corporel. Il apprend à localiser et nommer différentes parties de son corps. Il découvre les fonctions de chacune.

 

L'évocation de la nature est une constante dans les comptines. Elle aide l'enfant à prendre son temps pour grandir, se référant à la lenteur des saisons et la poussée des végétaux.

Ce n'est pas pour rien si les petites filles naissent dans les roses et les petits garçons dans les choux !...

 

 

Compter, Dénombrer

 

1,2,3, je m'en vais au bois

4,5,6, cueillir des cerises

7,8,9, dans mon panier neuf

10,11,12, elles seront toutes rouges

 

Vers 2 ou 3 ans, l'enfant apprend à réciter les nombres. Il sait compter mais pas encore dénombrer.

Cette faculté se développe progressivement, il repère d'abord quand il y a 1 objet, puis 2 objets, puis beaucoup.

 

C'est ce "beaucoup" qu'il va falloir apprivoiser. Pour cela, il apprendra à différencier les objets, à les regrouper, à les classer selon leur forme, leur couleur…

 

L'enfant est prêt alors à percevoir le monde environnant dans son organisation.

 

Le chiffre 12 présent dans cette comptine est très important. Il symbolise l'univers et l'harmonie de ses cycles. Il rythme les 12 heures du jour et de la nuit, les 12 mois de l'année…

 

 

Jouer avec les doigts

 

Ils étaient 5 dans un grand lit

Et le petit poussait, poussait,

Et le pouce tomba du lit.

Ils étaient 4 dans un grand lit,

Et le petit poussait, poussait,

Et l'index tomba du lit.

Ils étaient 3 dans un grand lit,

Et le petit poussait, poussait,

Et le majeur tomba du lit.

Ils étaient 2 dans un grand lit, et le petit poussait, poussait,

et l'annulaire tomba du lit,

Il était seul dans le grand lit,

Et le petit se dit :

j'ai de la place dans ce grand lit.

 

Il faut présenter les doigts de la main tendus à l'enfant et les replier au creux de la main au fur et à mesure qu'ils sont cités dans la comptine.

 

La main symbolise la famille et les doigts ses différents membres. L'enfant prend sa place au sein du groupe, il perçoit son appartenance et sa différence.

 

Dans cette comptine le récit est très important car il raconte une histoire entière. De plus elle fait appel à l'interprétation, au mime et au jeu théâtral.

 

 

Jouer avec l'autre

 

Je te tiens,

Tu me tiens,

par la barbichette,

le premier

qui rira

aura une tapette

 

L'enfant est assis sur les genoux de l'adulte, face à face, ils se tiennent mutuellement par le menton.

 

Les deux partenaires sont à égalité, l'enfant n'est plus en position de récepteur mais d'acteur.

 

Ce jeu se termine souvent par des éclats de rire, mais il est surtout l'occasion pour l'enfant d'apprendre à dominer ses émotions, à masquer ce qu'il ressent.

 

Il marque l'entrée de l'enfant dans le jeu social des rapports humains.

 

C'est une des rares comptines où une image masculine est présente symbolisée par la barbichette.

 

 

Comptiner utile

 

Un petit cochon

pendu au plafond,

Tirez lui la queue,

Il pondra des œufs,

Combien en voulez-vous?

Un, deux, trois…

Tirez lui plus fort

Il pondra de l'or!…

 

Il est de rigueur de débuter un jeu de groupe par l'énoncé d'une de ces formules magiques.

Personne ne remet en cause l'issue du tirage exempt de tout privilège et favoritisme.

Elle permet d'entrer dans le monde merveilleux du jeu.

 

Une autre fonction de la comptine est d'assurer la cohésion et l'homogénéité du groupe. Répétée en cœur, elle rythme l'action, la marche : "1 KM à pieds ça use, ça use…"

Elle trouvera son prolongement dans les chants de travail.

 

Les pédagogues ont bien compris qu'elles pouvaient les aider à faire apprendre aux enfants des notions complexes. Certaines sont au service des jours de la semaine, des tables de multiplication ou des conjonctions de coordination : "Mais où est donc Ornicar ?"